Protégé.
« Protégé », titre énigmatique de la dernière série de photos de Sadie,
l’équivalent visuel des envols pédale wah-wah de Jimi Hendrix
La photographie comme une roulette russe
calibre inconnu du shooting qui produit distorsions, anamorphoses,
une autre géométrie du monde
la perception comme voyance hallucinatoire pure,
le psychédélisme comme passage, éveil à des états de conscience modifiée,
à un inconscient génétiquement stone, transpersonnel, transpécique
Sadie ou la photographie comme une roulette russe
se tirer une image dans la tête
se tirer un flot d’images en plein sexe
Un « Je me tais pour tout dire » crève les images de cette cérémonie secrète
Une créature cagoulée latex, en soutien-gorge
face à une encordée emprisonnée dans un lacis de lianes rouges
Interrogatoire dans une maison close,
deux fausses prisonnières face à la vraie liberté
celle de la roulette russe, rusée, du clic de l’appareil-photo
qui tire des grands fauves inconnus,
qui mitraille un décor, des corps
dont s’échappent des images qui tournent le dos aux images en 2D
Des images folles qui donnent le « la » de l’autre vie,
qui exhument le dessous des choses,
qui nous soufflent que
même la raison la plus droite est courbe comme le rire des gitans
Girl in latex exhalant son texte de fumée, ses volutes de cigarette
« mon visage tombé dans la nuit recrée le jour
ma peau lactée vous tente ?
baisez-moi riffs de Fender Stratocaster » hurlent les yeux en amande, la bouche sertis de caoutchouc
Shibari, un mot japonais pour un voyage dans la contrée des sans-mots
une femme-lampion suspendue au plafond
poignets liés, chevilles sanglées en guise de prière érotique
le corps nu crie sous les cordes
agonie de la mort sous les décibels chromatiques de Sadie
Fric frac de l’espace qui se dédouble,
en proie à la bifurcation de ses axes, de ses angles
histoire de torpiller les lois, de brûler les codex,
d’exploser la donne physique sous l’alchimie
Encore une image trans-image de Sadie et le monde va exploser
tic tac du temps qui se mange lui-même
Sadie ouvre les portes
à la girl suppliciée bondage,
à la girl encagoulée qui tisse son vitrail de nicotine, petites molécules de C10H14N2
Pour déloger la terreur d’être nées,
les deux poupées s’amarrent, chacune à sa manière,
latex fetish terrorisme ou ficelage dans des cordes de chanvre
Sadie fracasse le hier sur l’aujourd’hui,
exit la tiédeur,
exit le ronronnement des choses et des actes
la topologie gondole,
viol des volumes par 69 dimensions
trip Voodoo child,
merci à toi, Jimi Hendrix, merci aux chamans,
effets larsen on vous disait
bingo vous qui lisez êtes avalé dans ces photos maelstrom
Vous vous retournez sur votre ombre ?
Trop tard
il n’y a plus rien que le rien
et Sadie qui s’enfuit à dos de nuages roses
Bienvenue aux écorchés qui refont le monde sur le fil de leurs blessures, de leurs extases
bienvenue dans l’univers de Sadie.
Véronique Bergen.
Modèles: Jod & Nikita.
Lieu et Bondage: Willy Viez.